Aménagement cyclable |
Edit:10 févr. 2022, Cre:06 sept. 2019
Les problèmes de qualité des aménagementsIntroductionLa qualité de réalisation des infrastructures cyclables en France est souvent pitoyable. Il y a sans aucun doute de très sérieux problèmes de compétences mais aussi le fait que l’organisme Français principal de standardisation routière, le CEREMA n’émet généralement que des recommandations sans caractère obligatoire, qui sont pour les infrastructures cyclables majoritairement non respectées. Par ailleurs, il y a un problème fondamental lié à la décentralisation (1983), il n’existe plus de structure de contrôle et les fautes de conception ne sont non seulement pas pénalisées mais elles ne sont souvent même pas signalées. Les signalements reposent généralement sur le travail bénévole d’associations voire de particuliers. La France est l’un des pays du monde ou le taux d’imposition est le plus élevé, on pourrait espérer une qualité minimale de service qui est ici dramatiquement absente.
Pourquoi?Il n’y a pas de formation ou de certification associée à la réalisation des infrastructures cyclistes (et des infrastructures urbaines ‘pacifiées’ en général) et pas de validation des aménagements. Je suppose que certains aménageurs s’imaginent qu’ils savent faire du vélo parce qu’ils vont se promener à 12 ou 13 km/h le week-end en vélo. Il est clair que les infrastructures de transport cycliste ne sont généralement pas essayées par ceux qui les ont conçues et construites.
La majorité des problèmes est liée à l’absence de compréhension du mode de pensée et de fonctionnement d’une personne qui se déplace à vélo et parce les infrastructures cyclables sont mal réalisées à contrecœur par des collectivités qui y sont contraintes par la loi. Les arrêtsSur un vélo musculaire, repartir après un arrêt complet représente un effort équivalent à rouler 300 ou 400 m sur du terrain plat, aussi les cyclistes évitent au maximum de s’arrêter et hésitent souvent même à ralentir. C’est la raison pour laquelle beaucoup franchissent les feux rouges, ce qui est parfois dangereux. Autoriser le franchissement des feux là ou cela peut se faire sans danger est indispensable et cela serait aussi un bon rappel que là ou c’est dangereux, les feux doivent être respectés. On commence à trouver des panneaux autorisant le franchissement de certains feux mais ils sont en général beaucoup trop petits et assez peu visibles (et totalement invisibles pour les automobilistes qui en acquièrent la conviction que les cyclistes ne sont qu’une armée de sauvages indisciplinés qui ne respectent rien) Les aménagements routiers n’étant absolument pas prévus pour les cyclistes, ceux-ci tendent naturellement à s’affranchir de certaines règles qui ne sont pas pertinentes pour eux et souvent le non respect des règles améliore leur sécurité. Mais dans ce contexte beaucoup arrivent à un non-respect des règles plus large qui les mets en danger. Le mélange entre les piétons et les cyclistes.Pour pallier l’absence d’aménagement cyclable et pour préserver la largeur des emprises des véhicules motorisés, beaucoup d’aménageurs choisissent de faire des voies partagées entre les piétons et les cyclistes. C’est très souvent le cas sur les ponts. Très souvent aussi les voies cyclistes et piétonnes sont simplement séparées par une bande peinture et non par une barrière physique ou un changement de niveau. La peinture n’a jamais empêché et n’empêchera jamais les piétons d’envahir une voie cyclable.
Il y a des incivilités réciproques entre piétons et cyclistes. Les cyclistes n’aiment pas s’arrêter et beaucoup de piétons n’appréhendent pas correctement le temps de réaction d’un cycliste. La manœuvrabilité d’un vélo est excellente mais il faut compter avec le temps nécessaire pour se retourner pour voir s’il est possible de s’écarter et aussi avec le délai normal de réaction. En France, les piétons sont toujours prioritaires sur les voies partagées et lors de traversées mais on doit disposer d’un temps suffisant pour estimer leur intentions. Ces incivilités sont beaucoup moins dangereuses que celles avec les véhicules motorisés mais cela ne contribue pas à une bonne cohabitation. Une bonne infrastructure avec des séparations claires permet d’améliorer les évaluations d’intentions et de limiter les situations conflictuelles. L’absence de continuité.L’absence de continuité des voies cyclables est liée en partie au mode de fonctionnement des aménageurs urbains, qui refont les rues au coup par coup, sans chercher à faire des itinéraires (ce qui n’est pas forcément nécessaire pour les réaménagements des rues). Il y a aussi un problème majeur qui n’est pas bien compris par les utilisateurs, c’est qu’en France, une municipalité n’est pas responsable de toutes ses rues, les rues ayant un statut national ou départemental étant en dehors de sa zone de compétence. Une municipalité n’a donc qu’un contrôle très partiel de son territoire routier, souvent uniquement sur les voies secondaires. L’existence et la continuité des aménagements nécessite donc une coordination entre les différents échelons qui visiblement ne fonctionne pas très bien. Si un seul des acteurs est un élément hostile, la situation est bloquée et on observe parfois des situations hallucinantes avec des conflits lourds entre les différentes parties.
L’examen des plans de voies cyclables sur une ville défie généralement la logique et la notion d’itinéraire ou de cheminement est presque totalement absente de l’infrastructure cyclable actuelle. Ceci explique aussi que malgré un budget hors de proportion avec les besoins, le « plan vélo » a été accueilli favorablement par les associations car il porte la promesse d’une meilleure cohérence dans la planification. On verra à l’usage mais au-delà des discours, la volonté politique réelle semble manquer. Parmi les points presque toujours problématiques il y a celui des ponts, dont la largeur n’est pas toujours suffisante pour accueillir une voie cyclable et sur lesquels les automobilistes sont très fréquemment en excès de vitesse. Les seuils et rebordsBeaucoup d’entrées et sortie de voie cyclable voire même beaucoup d’intersections et parfois même (horreur !) certaines sorties de propriétés ont des seuils d’entrée ou de sortie sur la voie cyclable.
Les objets contondantsOn trouve souvent sur les pistes ou leurs bords des équipements dangereux pour les cyclistes qui peuvent causer des accidents sérieux, que soit des poteaux béton, métalliques ou le pire, des plots ou des demi-sphère béton parfois non signalés. Rappelons la recommandation du Cerema (organisme d’état chargé de conseiller les aménageurs): Un choc de cyclistes contre un potelet peut avoir de graves conséquences. Par conséquent, seul le potelet à mémoire de forme est recommandé (plastique). L’utilisation de potelets métalliques, bois ou béton est déconseillée.
Largeur des emprises et choixBeaucoup de villes Françaises ont leur partie centrale, voire pour certaines la majorité de leur territoire figées depuis des décennies, sans possibilité d’extension territoriale. Le trafic automobile ayant explosé dans les quarante dernières années, les possibilités d’aménagements sont souvent restreintes au passage en sens unique d’une voie à double sens. Par ailleurs, aujourd’hui, le stationnement n’est plus toujours fait sur des parcelles privatives mais très souvent sur le domaine public, une très grosse parties des emprises est donc désormais réservée au stationnement. Cette évolution est parfois très spectaculaire et je vais vous donner un petit exemple personnel pour appuyer mon argumentation. J’habite aujourd’hui dans la maison ou je suis né. Dans mon enfance, la circulation dans ma rue était négligeable et les enfants y jouaient en toute sécurité. Il n’y avait AUCUNE voiture stationnée dans la rue, les gens possédant une voiture ayant soit un garage sur leur propriété, soit louant des garages sur des domaines privés. TOUS les garages indépendants du quartier ont disparu, pour beaucoup remplacés par de luxueux pavillons. Aujourd’hui dans ma rue, il y a une file de stationnement continue majoritairement occupée par des voitures d’habitants des voies adjacentes ou de travailleurs opportunistes car le stationnement y est gratuit et la gare est proche. Les enfants ne peuvent plus y jouer sans être en danger. Et tous les immeubles sont désormais fermés par des portails électriques. L’axe majeur le plus proche est devenu a sens unique avec une seule voie très large et une file de stationnement de chaque coté. A l’exception d’une zone d’activité derrière la gare, la majorité des emprises de la ville est telle qu’elle était en 1930. On ne peut pas restituer une partie des emprises aux autres usagers sans en priver en partie les automobilistes, principalement en supprimant des files de stationnement. Ceci implique des choix politiques qui vont susciter des protestations, aussi la politique cyclable locale relève généralement du bricolage avec un peu de peinture. Par exemple l’axe principal de traversée de la ville n’a toujours pas de voie cyclable alors qu’il y a un flux très important qui pourrait potentiellement être cycliste car c’est une zone assez dense ou les itinéraires sont souvent assez assez courts. Le seul élément qui constitue un progrès tangible est le développement des double sens cyclable qui sont une réelle facilité pour la circulation à vélo. Ligne d’arrêt de feu et feux vélos.Du fait de leur faible vitesse et de leur très faible accélération, il est admis que les vélos doivent partir avant les voitures pour être en sécurité.
Un facteur aggravant est la présence universelle en France de ‘répétiteurs de feu’ de petit diamètre en position basse qui permettent aux automobilistes de voir les feux lorsqu’ils sont tout près de ceux-ci. Sans ces répétiteurs, les automobilistes sont bien obligés de rester à distance sinon ils ne peuvent pas voir les feux. La simple suppression des répétiteurs améliorerait la sécurité et le respect des lignes d’arrêt, ce pour quoi militent certains en vue d’améliorer la sécurité des piétons. Les ‘sas vélos’ sont en fait un aménagement qui réservent aux vélos l’espace entre la ligne d’arrêt de feu et le passage piéton.
Cependant, ce n’est pas la solution et par exemple, vous ne trouverez jamais de sas vélo aux pays-bas.
On doit avoir des ‘feux vélos’ en position très avancée et sur le bord droit, après le passage piétons, en maintenant les vélos bien à droite pour ne pas les exposer aux véhicules prenant le virage. La suppression du bout de la file de stationnement s’il y en a une (qui est désormais obligatoire 5m avant les passages piétons) laisse toute la place sur la droite pour une position avancée des vélos. Encore une fois, il faut regarder ce qui se fait aux pays-bas. Une solution de compromis économique serait plutôt que de supprimer les répétiteurs de feux, de les transformer en ‘feux vélos’ qui n’autoriseraient QUE le départ des vélos (les feux vélos sont standardisés). Cela nécessiterait la modification des automates de feu et parfois un recâblage des répétiteurs mais c’est techniquement assez simple et n’implique que très peu de modifications sur le carrefour. C’est loin d’être idéal, mais c’est simple et rapide à faire. Les boutons d’appel de feuLes boutons d’appel pour commander les feux sont déjà une nuisance forte pour les piétons, mais c’est encore pire pour les vélos car quand une piste est adjacente à un passage piétons, il n’y a jamais de bouton d’appel spécial vélos et le bouton est inaccessible (et parfois invisible) a un vélo qui reste sur la piste. Par ailleurs, ces boutons sont souvent inactifs a certaines périodes (le jour, la semaine) sans que cela ne soit jamais indiqué.
Les détecteurs de véhiculesCertains feux sont équipés sur les axes secondaires de détecteurs de véhicules qui ne détectent pas les vélos. Donc le cycliste peut attendre éternellement que le feu passe au vert, c’est sans espoir. Il ne va pas attendre très longtemps la première fois et la fois suivante, le cycliste passera directement au rouge vu que c’est sa seule option…
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